Thé CCCLXV
Éclairer la cuisine.
Une lampe qui se mire à la surface des bols.
Allumer la radio.
Repérer la table.
Sortir deux bols,
deux cuillères,
deux pots de confiture.
Couper six à huit tartines,
les placer dans le grille-pain,
le mettre en marche.
Sortir quatre grammes de thé noir.
Tirer un litre d’eau,
le verser dans une bouilloire.
Placer celle-ci sur une résistance électrique,
Tourner l’interrupteur sur la position maximale.
Déposer une soucoupe pour recueillir les cadavres des petits sachets sacrifiés.
Sortir du réfrigérateur un citron en partie pressé.
Surveiller la cuisson des tartines.
Guetter le sifflet de l’amie joufflue.
Tourner l’interrupteur de la plaque électrique.
Sortir le sachet de thé de son enveloppe,
le déposer dans le bol.
Remplir les bols d’eau.
Tirer à soi deux chaises.
Laisser infuser trois minutes.
Tremper ses tartines recouvertes de confiture dans l’infusion.
Ôter le sachet et
regarder d’un œil désabusé le trajet des gouttes jusqu’à la soucoupe.
Boire sans se brûler.
Reposer le bol.
Trouver une éponge humide pour essuyer la table.
— “Et les miettes ? Qu’est-ce que j’en fais ?”
Une poubelle, un sac en plastique.
Une pendule qui rythme les étapes.
Un balai.
Une pelle à poussières.
Un évier.
Une dose de produit moussant.
Un filet d’eau.
Un égouttoir.
Un essuie-mains.
Et tu as l’espoir de tenir le coup pendant trois cent soixante-cinq jours avec un matériau si réduit ?
Sérieusement, qui penses-tu intéresser avec ça ?
Fin