Thé CCCXLV
La pluie fit gonfler les volets.
T’as dû hier les raboter.
Les raboter, les pieds bottés.
La pluie avait mouillé tes pieds,
Bien que bottés de caoutchouc.
Tiens ! que fait là cette rim’ en “ou” ?
Tu m’avais dit : Ne rime qu’en “É” !
Mais pas ganté, juste botté !
Rabot en main, volet bouffi !
Ah ! Non ! Je ne rime pas en “i’ !
Volèrent copeaux des volets bleus.
C’en est trop de tes rimes, mon vieux !
Achève ta menuiserie,
Ramasse ta quincaillerie !
Graisse les gonds, plie l’établi !
La pluie fit gonfler les volets,
On n’pouvait plus les refermer,
Les vieux volets de bois gonflés.
T’as dû de nuit y travailler,
Quand tu voulais pondr’un billet.
Le vent du nord soufflait glacé.
Clairs copeaux des volets bleus,
Au jardinet sont dispersés,
Le vent du nord en fit un jeu.
T’aurais dû tes gants enfiler,
Tes mains sont bleues et tremblent un peu
L’onglée t’aurais pas attrapée !
Tu as pris froid, quitte tes bottes,
Trouées aussi ! Mais quelle idée
De travailler, les pieds trempés.
Pieds mal chaussés, nus sous la flotte,
Buveur de thé, prends une calotte,
Que ça te serve de leçon !
Tu t’es conduit comme un melon !
Voilà tu tousses et tu grelottes !
Tu as pris froid à tes menottes,
A tes arpions et tes guibolles
La gorge te gratte, c’est pas de bol
Je t’avais dit : Achète des grolles,
Neuves et seyantes pour bricoler !
Tu m’avais dit : “J’vais y songer !”
Fallait d’viner que les volets
Allaient gonfler encor’ c’tt’ année.
Allez Papi, t’es pardonné.
J’t’ai fait un thé bien parfumé !
Thé aux pétales de cerisier,
Infusé à soixante degrés.
Viens dans mes bras te réchauffer.
Tu as trouvé c’que tu voulais.
Thé thé thé thé ! Thé thé thé thé !
Thé thé thé thé ! Thé thé thé thé !
Tes doigts gourds sur le clavier,
Se sont perclus, se sont grippés.
Moi ton épouse, j’t’ai remplacé.
Un p’tit billet vous est livré,
Le volet bleu en est l’sujet.
Chang’ment de style vous excus’rez.
Il a trouvé ce qu’il voulait.
Thé thé thé thé ! Thé thé thé thé !
Thé thé thé thé ! Thé thé thé thé !
Epouse-Tendrement-Enlacée
Pour l’réchauffer j’l’ai embrassé
Le grand benêt semble apprécier !
Le grand benêt semble apprécier.