Thé CCCXII
J’ l’ai bu tôt et chaud.
J’l’ ai bu chaud et tôt.
Mon thé chaud, l’ai pas raté c’te fois-ci.
C’te fois-ci, le thé, l’ai bien pris !
Donc j’l’ai pu, car bu tôt !
Oui j’l’ai bu, j’ai pu c’matin tôt !
Mais g’lée blanche, pa-pa-pam !
Fait pas chaud, ma p’tit’ dam’.
Dam’ au chaud, c’est râpé !
Faut s’lever pour bosser.
Nez pris ou doigts g’lés ?
Ni g’lé, ni pris, car doigts gantés et... cache-nez.
Avisés les époux levés zau zaurores.
Cette nuit, les vers de terre, précieux auxiliaires, ont commencé à enfouir les feuilles fraîchement trépassées. La pelouse va leur appartenir les cinq mois qui viennent. Ces petits animaux, si nombreux mais si discrets, vont brasser des mètres cubes de terre. Ah ! Les jolis tortillons qui sont s’ériger sur l’herbe verte !
— Epoux-Pas-Empoté, couperais-tu une salade pour le dîner ?
— Avec joie et avec un couteau*
— Tape bien tes semelles avant d’entrer !
— Je tape bien mes semelles avant d’entrer !
Je viens de fouler les cabinets des lombrics !
Précieux auxiliaires — je redouble — qui officient dans la plus grande discrétion et le sous-sol.*
G’lée blanche, on l’a !
Onglée ? J’lai pas !
Pas encore ! Trop tôt !
Les clés dans la poche.
— Sors tes mains de tes poches. Ouvre le portail que je recule la voiture !
— Mais, le froid ?
— Gentille nature ! Je forcerai le chauffage de la voiture !
G’lée blanche !
Pas l’temps de fair’ des photos !
D’autres y penseront !
G’lée blanche !
Avec un peu de chance, les vers de terre auront enfoui toutes les feuilles avant Noël. La corvée de balayage se sera dissipée dans le labeur des lombrics, d’autant que les coriaces feuilles du cerisier ne sont plus une besogne à leur charge.
Restent les feuilles du figuier !
Là, je dois aider, les vers auraient la taille de concombres qu’ils arriveraient peut-être à vaincre ces rudes bractées, mais là, avec leur demi-centimètre de circonférence, non, ce serait trop demander.
— La taille d’un concombre ? Il faudrait reboucher les trous au printemps et le brave merle serait obligé de livrer de fameux combats pour nourrir ses petits !
Je m’occuperai du figuier. La charmille, en automne, est autonome, ses feuilles marcescentes* nous tiendront compagnie tout l’hiver.
Les vers, de tout l’hiver, s’emploieront au reste.
— Je ferme le portail. As-tu monté le chauffage ?
— Pas assez cependant pour éviter le dégivrage manuel du pare-brise !
L’onglée, j’l’aurai p’ête.
P’ête, c’est qu’c’est pas sûr !
C’qu’est sûr, c’matin, c’est qu’l’thé, j’lai bu.
Tôt !
Tôt thé !
Tôt thé, c’est b’en p’u sûr !
*Hommage
appuyé à M. Morel, professeur de français
en classe de cinquième qui se
cassa le col du fémur
en voulant épater ses élèves en descendant
la
rampe de l’escalier à califourchon.
L’histoire n’a pas retenu ce que
M. Denis,
le directeur du C.E.G.,et lui,
échangèrent en attendant
l’arrivée de l’ambulance.